Histoire inconnue voire méconnue des Communautés juives
Le journal de notre Région relatait dans une brève, la nomination d’un nouveau rabbin au Japon. Quelques jours auparavant, l’un de nos membres me parlait de sa fille, mariée au pays du soleil levant, et me disait combien la vie y était agréable.La coïncidence était trop évidente et elle éveilla ma curiosité.
Voici donc les résultats de ma quête à la recherche des Juifs du Japon.
Les premiers arrivèrent au milieu du 19e siècle lorsque la Convention de Kanagawa permit au Japon de s’ouvrir au Monde. Dés l’année 1861, des marchands juifs venus des Indes, d’Irak ou du Yémen ouvrirent des comptoirs. L’un des plus important fut fondé à Nagasaki en 1883, profitant de l’essor de ce port sous l’influence des navigateurs portugais.
Parallèlement, une communauté forte de 50 familles s’installa à Yokohama où elle construisit la première synagogue du Japon.
Au début du 20e siècle, un conflit éclate entre la Russie et le Japon pour des revendications territoriales sur les régions de Manchourie et de Corée, le Japon fait de nombreux prisonniers russes dont quelques uns, de confession juive, viennent grossir la Communauté.
En 1923, un important tremblement de terre faisant de nombreuses victimes et de gros dégâts matériels oblige les membres survivants de la Communauté à s’exiler vers Kobe. Situé à l’entrée de la Mer du Japon, Kobé était un port très fréquenté. Au 12e siècle, déjà, il était le passage obligé de tout le commerce maritime entre les différentes îles formant le Japon. Au 19e siècle, le commerce international prenant un essor sans précédent, Kobe fut rapidement reconnu comme le principal port d’Asie.
De nouveaux Juifs russes venus pour échapper aux pogroms, transformèrent rapidement le petit groupe de Kobe en une Communauté florissante forte de quelques centaines de Membres. Ces immigrants russes furent rejoints par des Juifs venus d’Irak et de Syrie et deux synagogues, l’une ashkénaze, l’autre sépharade, furent construites. Les Juifs étaient tolérés et vivaient en bonne intelligence avec leurs voisins, d’autant plus que beaucoup de leaders japonais croyaient en leur pouvoir économique et politique.
Ces leaders, grands lecteurs de ce faux honteux « les Protocoles des Sages de Sion », mirent sur pied un plan pour installer des Juifs d’Europe et d’Asie, au Japon. Ce plan, appelé « Plan FUGU », du nom du poisson extrêmement toxique, quelquefois mortel, dont raffolent les Japonais (par analogie au présumé danger que représentait les Juifs), consistait en l’installation massive de Juifs d’Europe à Mandchoukouo et à Shanghai (ville occupée par les Japonais). En les surveillant étroitement, ces réfugiés apporteraient un essor économique semblable à celui des Etats-Unis d’Amérique où les Juifs étaient influents.
Les Autorités nippones pensaient pouvoir renverser en leur faveur l’opinion publique américaine et la rendre plus favorable à leur Diplomatie.
Des délégations japonaises se rendirent en Amérique du Nord afin d’y rencontrer des rabbins, elles avaient pour mission de trouver les similitudes supposées entre le judaïsme et la religion majoritaire au Japon, le Shinto.
Les Japonais prévoyaient faire venir quelques 600.000 Juifs.
Tout avaient été prévu pour les recevoir, liberté totale de culte mais aussi hôpitaux, écoles et activités pour tous les âges des nouveaux arrivants. Mais de la même façon que le poisson fugu est délicieux mais quelquefois mortel, les Juifs devaient être encadrés pour ne pas présenter un danger mortel pour la civilisation japonaise.
Ce plan se heurta rapidement à l’intransigeance de leur allié nazi qui mettait en place une politique d’écartement des Juifs du paysage européen.
Cinq hauts dignitaires japonais, dont le Premier Ministre Fumimaro Konoe, se réunirent le 6 décembre 1938 et décidèrent de surseoir au plan Fugu, tout en permettant à 14 ou 15.000 Juifs de l’Est de trouver refuge dans la quartier japonais de Shanghai. Le plan Fugu fut officiellement abandonné en 1939 lorsque les Soviétiques signèrent un pacte de non agression avec l’Allemagne nazie, rendant impossibles les transports de Juifs réfugiés vers le Japon.
La signature du pacte tripartite entre l’Allemagne, l’Italie et le Japon enterra définitivement l’idée même du plan.
Dans le même temps, beaucoup de Juifs de Pologne avaient cru trouver un refuge en Lituanie, ils déchantèrent rapidement et plus de 10.000 d’entre eux furent sauvés par un jeune diplomate japonais China Sughara, qui, malgré l’opposition de son gouvernement, leur délivra des visas pour gagner Shanghai. Sughara fut nommer Juste des Nations par l’Etat d’Israël en 1985.
C’en était trop pour l’allié nazi qui exigeât du Japon la création d’un ghetto à Shanghai. Conseillés par le « Bourreau de Varsovie », le nazi Josef Meisinger, les Japonais décidèrent le déplacement des Juifs de Kobé vers Shanghai et édifièrent un ghetto sous la surveillance stricte de l’armée et administré à l’image du ghetto de Varsovie. Quelques 2000 Juifs moururent dans ce ghetto oublié.
Au Japon même l’opinion publique était beaucoup plus tolérante vis-à-vis des Juifs installés depuis quelques décennies déjà, ceux-ci n’eurent pas à souffrir de traitements discriminatoires.
A la fin de la guerre plus de la moitié des Juifs réfugiés au Japon émigrèrent vers les Etats-Unis ou le Canada et plus tard vers Israël. Ceux qui restèrent s’assimilèrent à la société japonaise, de nombreux mariages mixtes renforcèrent cette assimilation.La Communauté juive s’enrichit de soldats américains de confession juive stationnés jusqu’en 1952 sur la base d’Okinawa.
Aujourd’hui quelques 1000 Juifs vivent au Japon, originaires de différents pays mais le plus gros contingent est formé de Juifs originaires des Etats-Unis.
Peu de Japonais se sont convertis au judaïsme mais il existe à tous les niveaux de la société japonaise, un grand intérêt pour l’histoire des Juifs.
Les rapports entre le Japon et Israël sont au beau fixe et de nombreux accords commerciaux ont été signés. Des traités importants d’assistance mutuelle en cas de « cyber attaque » lient les deux pays.
Je ne puis terminer sans vous parler de la secte Makuya.
Quelques 6000 adeptes, chrétiens japonais, sont persuadés que les Japonais sont l’une des 10 tribus perdues d’Israël, la tribu de Zébulon. Les fidèles apprennent l’hébreu, font des pèlerinages en Israël et suivent un syncrétisme judéo chrétien auxquels s’ajoutent des pratiques shinto.
De nos jours, malgré le petit nombre de juifs en comparaison des 127 millions de Japonais, on assiste jusque dans les allées du pouvoir impérial à un réel engouement pour ce peuple millénaire.