Le 4 Novembre 2009 l’Arabie Séoudite intervint
militairement contre les Houthis soutenus par l’Iran.
Coups d’états, rebellions, insurrections, changement
de régime, ont fait, à ce jour plus de 50000 morts. 1 million
de Personnes sont atteintes du choléra et 8 millions
d’autres au bord de la famine d’après les instances
internationales.
Le Yémen, pays béni des Dieux, où, a certaines
époques, toutes les communautés vivaient en harmonie,
m’intéressait au plus haut point car j’avais lu, il y a bien
longtemps, dans l’Encyclopédie Judaïca, qu’un royaume
juif y avait existé.
Vous connaissez mon intérêt pour les Communautés
inconnues, celle-ci devait répondre à ma curiosité.
Dans l’Antiquité, le Yémen (la droite en langue
locale, car sa position était à droite sur la carte
par rapport au lever du soleil), est un territoire
faisant partie du Royaume de Saba. De nombreuses
hypothèses, circulent sur l’arrivée des Juifs dans le sud
du golfe persique. L’une d’entre elles raconte l’histoire de
marchands juifs envoyés par Salomon à la
recherche de mines d’or et d’argent, minéraux
nécessaires à la décoration du Temple que le Roi faisait
construire à Jérusalem. Une autre légende raconte la
conversion de plusieurs tribus après le mariage de
Salomon et de la Reine de Saba.
La tradition des Juifs de Sanaa (capitaledu Yémen)
relate que quelques 75000 Juifs, dont des Prêtres,vinrent
s’installer dans cette région à l’époque du prophète Jérémie.
D’autres légendes encore circulent, peu sont avérées,
mais elles attestent une importante proximité entre ce
pays et l’histoire des Juifs du Proche-Orient.
Des recherches archéologiques plus sérieuses mirent
en lumière des vestiges liés à une communauté juive
existant dans le royaume de Hyamar, au sud ouest de
la péninsule arabique, royaume qui se situait sur les
lieux mêmes du Yémen d’aujourd’hui. Il fut fondé
en 110 avant l’ère chrétienne et se maintint
jusqu’en 525 après J.C. De nombreuses
inscriptions hébraïques laissent à penser que des
synagogues furent érigées avec la bienveillante
permission des Rois de Hyamar.
Ce riche royaume, intermédiaire du commerce
entre l’est de l’Afrique et le Bassin méditerranéen,
était réputé pour sa production d’encens et de myrrhe.
Les navires marchands hyamarites transportaient
l’ivoire d’Afrique vers l’Empire romain ; ces voyages
permettaient aux marins de connaître et de s’ouvrir à
d’autres cultures. Pays riche, autosuffisant sur le plan
agricole, accueillant de nombreux courants religieux,
il permettait à sa population d’adorer
différentes Divinités.
Aux alentours de l’an 380, le Royaume d’Aksum
(l’Ethiopie) voisin, se convertit au christianisme, l’Empire
Byzantin, subissant l’influence de l’Empereur
romain Constantin, se convertit à son tour au
christianisme.
Aksum convoitait Hyamar, ses richesses dues aux épices
et aux échanges commerciaux florissants sur la route des
Indes. L’Empereur aksumite avait décidé d’en prendre
le contrôle et d’y installer un protectorat sous sa coupe
non sans avoir obligé la population à devenir chrétienne.
Pour desserrer l’étau, le roi de Hyamar tenta une
expédition qui s’avéra victorieuse, à l’issue de laquelle il
décida de se convertir au judaïsme. L’anecdote qui l’incita
à se convertir fut une grave blessure de son fils au
cours de l’assaut, 2 médecins juifs qui suivaient son
armée, le sauvèrent. Reconnaissant, le Roi décida
d’abandonner son polythéisme et d’adopter la religion
juive. C’était aussi une manoeuvre politique, entouré
qu’il était par les deux Empires chrétiens. Il demanda
à tout son peuple de suivre son exemple, l’armée se
convertie en premier, puis, malgré quelques réticences,
le peuple hyamarite suivit l’exemple de son Roi.
Les historiens expliquent ces conversions massives par le
désir du Peuple d’obéir au Roi, mais aussi par l’attirance
des hiymarites pour une religion simple mais austère qui
correspondait à leurs aspirations.
Après la mort du Roi Abu Kariba, sa dynastie régna en
observant la nouvelle religion. Mais Aksum n’avait pas
baissé les bras, de fréquentes incursions motivées par les
persécutions des chrétiens à Hyamar, sapaient petit à petit
le pouvoir des descendants d’Abû. Le Roi prenait prétexte
des attaques subies par les Juifs dans l’Empire romain pour
persécuter les Chrétiens, venus pour la plupart de l’Empire
byzantin. L’influent royaume d’Ethiopie se décréta
protecteur des Chrétiens, il envahit le royaume juif en
523, destitua le monarque Dhu Jadan dont la barbarie
vis-à-vis des Chrétiens était légendaire.
Le Négus mit en place un roi chrétien, ce dernier fit construire
une cathédrale à Sanaa espérant attirer de nouveaux
fidèles.
Ce fut peine perdue car une nouvelle foi commençait
à naître : l’Islam, Conquérante, cette nouvelle religion
n’imposait pas la conversion de tous les habitants des
territoires conquis, seul le roi et les dignitaires de la Cour
devaient se convertir, les peuples suivirent rapidement.
En 629 les Musulmans s’installèrent à Sanaa et firent de
l’Islam la religion officielle, les Juifs et les Chrétiens qui
voulaient conserver leur foi n’étaient pas obligés d’embrasser
l’Islam, ils étaient tolérés à condition de payer un lourd
tribut, le « zakat » qui faisait d’eux des sujets de seconde zone
.
Pendant plusieurs siècles cette situation perdura, au
12ème siècle de nombreux marchands juifs étaient installés
à Aden, ils formaient une riche communauté avec à sa tête
la famille Bundar, cette famille d’armateurs possédait une
flottille qui commerçait avec l’Inde et Ceylan. Elle entretenait
de nombreux contacts avec les communautés juives
de Babylone, de Palestine ou d’Egypte.
La situation faite d’une certaine stabilité entre les confessions
changea radicalement en 1517, lorsque l’Empire
ottoman envahit le Yémen. L’oppression se fit chaque
jour plus dure, des synagogues furent détruites et les Juifs
durent se convertir à l’Islam. Des lois nouvelles décrétèrent
que tous les orphelins de parents non musulmans soient
adoptés par des musulmans et éduqués selon les préceptes
du Coran. Les Juifs avaient été déclarés « impurs », ils
n’avaient pas droit de toucher aux aliments servis aux
musulmans, ils devaient se montrer humbles, marcher sur
le côté gauche des chemins, ne pas construire de maison
aussi hautes que celles des musulmans et ne pas posséder
de chameaux ou de chevaux, seuls les ânes ou les mules
leurs étaient permis.
Ces règles furent abolies au 17ème siècle puis rétablies au
18ème lorsque les Imams accusèrent les Juifs de fournir du
vin aux musulmans. Petit à petit, malgré le joug des Imams,
les Juifs reformèrent une Communauté et on leur permit
de remettre en état la plupart des synagogues. Un rabbin
devint même Ministre du Trésor. La Communauté était
très orthodoxe et elle avait sans cesse les yeux tournés
vers Jérusalem, le fait de faire partie du même Empire,
facilitait l’émigration des plus religieux. A cette époque
on dénombrait quelques 370 villes ou villages où vivaient
des Juifs, ils étaient orfèvres, forgerons, armuriers, potiers,
maçons, charpentiers, tailleurs ou cordonniers. Sanaa, la
capitale, comptait 28 synagogues où les fidèles étaient assis
à même le sol. Suivant les lois en vigueur les synagogues
devaient être plus basses que la plus petite des mosquées,
aussi avait-on pris l’habitude de construire une partie
souterraine afin de limiter la hauteur de la construction.
Mais la fin de l’Empire ottoman était proche, il s’écroula
après la défaite de l’Allemagne dont il été l’allié.
En 1918, le Yémen accéda à l’indépendance. Les Juifs purent
à nouveau avoir des contacts avec les autres Communautés
du Proche Orient, des voyageurs venus d’Occident venaient
les rencontrer. Deux d’entre eux, le français Joseph Halévy
et l’autrichien Eduard Glaser, eurent une grande influence
sur les milieux aisés, et mirent en place un système
moderne d’éducation.
Au début de ce siècle des vagues successives d’émigrants,
aidées par les organisations sionistes, se succédèrent en
Palestine. La Palestine, sous mandat britannique accueillit
quelques 35000 Juifs yéménites.
A la création de l’Etat d’Israël, en 1948, les musulmans
attaquèrent, dans tout le Yémen, leurs concitoyens juifs,
des centaines de maisons furent incendiées, un pogrom à
Aden fit plus d’une centaine de morts. Les vieilles rumeurs
de meurtres rituels perpétrés par les juifs firent prendre aux
Autorités israéliennes une décision unique dans l’Histoire
du monde : exfiltrer tous les Juifs du Yémen.
L’opération « Tapis volant » fut mise en place, des centaines
d’avions transportèrent vers Israël plus de 50000 Juifs de
juin 1949 à septembre 1950.
Selon des sources non officielles, il resterait aujourd’hui
moins d’une cinquantaine de Juifs dans la capitale Sanaa.
Voilà comment se terminèrent les vicissitudes de l’une des
Communautés juives les plus anciennes au Monde.