Sur un tas de cendres humaines une poupée est assise
C’est l’unique reliquat, l’unique trace de vie.
Toute seule elle est assise, orpheline de l’enfant
Qui l’aima de toute son âme. Elle est assise
Comme autrefois elle l’était parmi ses jouets
Auprès du lit de l’enfant sur une petite table.
Elle reste assise ainsi, sa crinoline défaite,
Avec ses grands yeux tout bleus et ses tresses toutes blondes,
Avec des yeux comme en ont toutes les poupées du monde
Qui du haut du tas de cendres ont un regard étonné
Et regardent comme font toutes les poupées du monde.
Parce qu’elle était poupée, la poupée eut de la chance,
Quel bonheur d’être poupée et de n’être pas enfant !
Comme elle y était entrée elle est sortie de la chambre,
Mais l’enfant n’était plus là pour la serrer contre lui,
Comme pour serrer l’enfant il n’y avait plus de mère.
Alors elle est restée là, juchée sur un tas de cendres.
Et l’on dirait qu’alentour elle scrute et qu’elle cherche
Les mains, les petites mains qui voici peu la tenaient.
De la chambre de la mort la poupée est ressortie
Ressortie avec sa robe et avec ses tresses blondes.
Et avec ses grands yeux bleus qui tout pleins d’étonnement
Nous regarde dans les yeux, nous regarde, nous regarde.
Moshé SCHULSTEIN
Extraits du Poème